jeudi 9 avril 2015

Partir vers Chingueti par la vallée Blanche

A travers l’Adrar au son du vent et de la flûte traversière.

Partir vers Chingueti par la vallée Blanche .

Les cartes sont difficiles à appréhender et afin de sortir des sentiers battus il nous apparait indispensable de prendre un guide . le contact passe bien avec Sid Hamed qui s’occupe de l’auberge Imini .

Auberge d’Imini ( c’est le nom d’une montagne très belle avec une très belle descente de sable . Avec le vent , tu vois les vagues de sable qui se déplacent comme ca !)

Un après midi nous élaborons ensemble notre périple qui nous amènera d’Atar à Chinguéti en passant par la vallée blanche . Donc , le lendemain ,nous partons en direction de l’oasis de Tergit .
 Rapidement nous quittons la piste principale . Descente en 4/4 sur des galets, nous roulons au fond d’un oued ,et finissons par stopper au fond d’un cirque . L’ambiance est minérale ,les couleurs vont de l’ocre , au rouge pour les galets oxydés, sur fond de noir des gros pavés basaltiques. Le bleu profond et intense du ciel rajoute sa teinte à ce paysage aux couleurs si vives . J’ai rapidement la sensation que le temps s’étire. Les heures ont cessé d’être des heures . On vit dans un nouveau temps qui n’est plus mesurable de la même manière. On peut être accroupis là autour de la théière à apprécier l’habileté de notre guide à verser et reverser le thé d’un verre à l’autre ,à l’ombre d’un acacia ,laissant passer les heures chaudes .On peut également se hâter afin d’établir un campement avant la nuit. Finalement Les repères habituels ont disparu . On est ailleurs . A nos pieds montagnes, plateaux , gorges s’étendent au-delà de l’horizon .On embrasse un panorama sur 360° , où on s’imagine être seul sur cette partie de la terre . Pourtant un berger vient à notre rencontre et nous invite à partager son repas. Nous qui ne vivons depuis notre enfance que dans un fond sonore constant , le silence de ces lieux est irréel , apaisant , magique .Cependant, on peut entendre parfois le petit sifflement du traquet ;l’oiseau qui porte bonheur au voyageur , mais aussi le souffle du vent qui coule sur les hauts plateaux .Lieux propices à la méditation ….si on veut.

Le lendemain c’est la conduite sur le sable mou du fond des oueds .C’est également la rencontre avec un groupe de femme aux tenues si colorées qui partent au champ récolter les pastèques .C’est également la surprise de découvrir une guelta encastrée au fond d’une gorge, petit lac circulaire où Manu plonge avec délice . Les dunes ,on croit au début que lorsque on en a vu une , on les a toutes vues .Surprise des surprises , elles sont toutes différentes , par leur forme douce mais ondulantes ,leurs arêtes cassantes ,vives , leurs couleurs pastels , nuancées du blanc à l’orange , dans une composition sans cesse renouvelée qui s’étend à perte de vue .Sur la fin de la journée ,il faut monter au sommet de la plus haute , s’asseoir et considérer cet océan de sable aux couleurs changeantes dans le soleil qui décroit. Enfin à pas de géant dégringoler dans le sable qui ruisselle jusqu’à sa base .C’est à ce moment qu’il convient de chercher un emplacement pour passer la nuit : à l’abri du vent , caché par une dune . Le véhicule à peine stoppé nous partons rapidement à la recherche de bois mort qui nous permettra de chauffer notre théière , mais aussi de préparer notre repas .
Ce matin, une grande étape nous attend, près de 60 km à parcourir. C’est peu ,mais les dernières pluies et les vents ont déplacé les dunes, modifié le lit de l’oued . C’est à pied en précédant la voiture qu’il faut retrouver un nouveau passage . Par endroits il faut ôter les plus grosses pierres ou bien à l’inverse paver sur quelques mètres un passage délicat .Une fois monté sur le plateau , c’est l’arrêt obligé pour dégonfler les pneus afin de ne pas trop s’enfoncer dans le sable . La piste est fréquemment coupée par une dune qu’il faut alors contourner .A d’autres moments nous perdons les traces , et il faut tout en zigzaguant à travers les arbustes, les grosses pierres , les ornières , conserver l’élan indispensable .Manu voit la piste à gauche Sid me fait signe d’obliquer à droite , et malgré cela nous ne nous ensablerons qu’une fois .Cette vigilance de tous les instants est épuisante .C’est au bout de 9 heures d’efforts que nous gagnons Chingueti la ‘’ tant désirée’’.
Lundi 14 février
Chingueti prépare la fête .Caravanes et 4/4 convergent vers celle que l’on appelle la 7eme cité de l’islam.Les tentes sont déjà étalées sur le sol. . Chinguéti est la porte du désert une escale obligée pour les caravanes sur la route du Mali, quelque peu désertée depuis que Mr Toyota a envoyé direct Marcel le chameau à la maison de retraite.
Mais ce n’est pas ce qui nous y amène .
Le 4/4 est provisoirement stationné , et c’est à pied que nous partons à travers les dunes .Nos bagages nous rejoindrons à dos de dromadaire à l’étape En quelques minutes la ville a disparu cachée par les premières dunes ,on est déjà enveloppé par un autre monde .Seul le bruit mat de nos pas nous accompagne .De leur sommet aussi loin que le regard porte on ne voit que sable et dunes. Des écharpes dorées remontent les pentes, s’enroulent autour des touffes d’herbes , s’envolent à chaque cassure .La dune garde le souvenir de ces habitants :ici la ligne sinueuse indique le passage d’un lézard. Là de petits points montrent la recherche d’un scarabé qui comme dit Manu : ceux là on sait jamais où ils vont ! A un détour, on aperçoit un fennec que notre présence a surpris.
Les plus grandes surprises , sont les vestiges que les siècles et les siècles de présence humaine ont laissé. Nous marchons sur une multitude de débris de poteries, d’éclats de silex , de pointes de flèches. Il y a là tout ce qu’il faut pour ouvrir une quincaillerie néolithique : racloirs , couteaux, haches , marteaux ,tout est en surface au creux des dunes. De multiples abris sous roche sont recouverts de peintures rupestres : scènes de chasses , dessins de girafes , d’animaux , d’enfants confirment que ce qui est désert aujourd’hui était savane il n’y a pas si longtemps !
Marcher sur le sable qui fuit sous nos pas est éreintant et nous apprécions l’étape .Rituel du thé , cuisson de la galette sous le sable, la nuit arrive vite et sous la voute étoilée Sid Hamed nous régale par ses contes traditionnels au moment où le sommeil nous attrape .
Sid Hamed me demande de raconter les douces siestes où je le berçais de mélodies irlandaises que j’interprétais à la flûte .La musique ne se raconte pas, elle s’écoute !Donc cela aussi restera (j’espère au milieu de tous ces souvenirs qui ne se photographient pas , ne s’enregistrent pas , ne s’écrivent pas , mais restent dans le coeur de chacun)


Merci encore, Sid Hamed pour cette merveilleuse découverte de ton pays.
philippe et manu